Pour ces raisons il n’est donc pas étonnant que ces
thèmes, comme d'autres, reviennent périodiquement sur le devant de la
scène.
Pour les
traiter je pense qu'il est utile de les examiner non pas de façon
émotionnelle et sortie de leur contexte, mais par une approche plus
globale.
C'est
pourquoi nous essayons de comprendre la raison qui a justifié non
seulement de porter ou non ce fameux voile, si important pour certains, en
réfléchissant à qui en serait la cause, le Créateur, les anges ou le mari.
D'emblée,
j'élimine l’hypothèse que ce serait à cause des hommes en général, car
nulle part dans la Parole il n'est fait mention que ce serait à cause
d'eux, mais seulement à cause des maris.
I
– Si c’est à cause du mari :
"Toute femme... qui prie ou qui
prophétise, la tête non voilée, déshonore son chef : c'est comme si elle
était rasée" (1 Corinthiens 11:5)
Selon ce
texte c'est par respect pour son mari (le chef de la femme : 1Cor 11:13,
Eph 5:23. Ce serait donc à cause de lui, que la femme devrait porter le
voile qui symbolise dans la tradition hébraïque la soumission de
l'épouse. A cette époque une femme qui refusait de porter le voile était
une marginale, une révoltée contre l’autorité du mari. Le voile était
porté même à la maison, et à l'extérieur c’est un second voile qui
couvrait non seulement les cheveux mais également le haut du visage
(Dictionnaire du Nouveau Testament)
Il faut
savoir qu’à l’époque qui nous concerne la femme juive porte donc deux
voiles. Le premier qu’elle garde même à la maison, et le second qu’elle
ajoute lorsqu’elle est en public.
Alors, une
réflexion s’impose : pourquoi ceux qui veulent que la femme porte le voile
dans l’assemblée limitent-ils leur exigence au deuxième voile uniquement
et non aux deux ?
La coutume
concernant le voile n’intéresse pas que les juifs, puisque le code
assyrien fait interdiction aux « hiérodules » (certaines prostituées) de
porter le voile, précisément parce que ce fameux voile était la
distinction des femmes mariées. En quelque sorte la « marque » de leur
appartenance.
Il est
évident, qu’il s'agissait là d'une coutume purement orientale, que
reprendront au 7ème siècle les musulmans, sous la forme que
nous connaissons, mais qui dès le premier siècle n’est pas du tout prisée
par la femme d'origine helléniste (de culture grecque) plus "moderne".
Dans son milieu elle avait déjà entre autres privilèges celui de
participer aux débats philosophiques. Evidemment, ces épouses-là
n'acceptent pas aussi facilement que la femme juive de « marquer » leur
dépendance ou appartenance à leurs maris ! .
C'est dans ce
contexte que se situe l'intervention de l'apôtre.
Il est
important de constater que les seuls textes qui mentionnent cette exigence
« paulienne » se situent dans la 1ère épître aux Corinthiens et dans la
lettre pastorale à Timothée. Ce dernier exerçant à cette époque son
ministère à Ephèse... c'est à dire dans la même zone d'influence
culturelle grecque, quelques centaines de kilomètres de mer séparent
Ephèse de Corinthe.
v
Une
première conclusion se profile :
Si le port du voile n’a comme
raison que de respecter son mari, selon ce verset 5, il faut tout
simplement se poser la question :
Est-ce qu'aujourd'hui un mari
attache la moindre importance à ce que son épouse porte ou non le voile
pour marquer sa prépondérance sur elle, et afficher la soumission de sa
femme aux yeux des étrangers ?
J’ose espérer que non.
Ø
Par
conséquent, l'usage du voile n'a plus aucun sens aujourd’hui en ce qui
concerne cette relation dans le couple.
II
– Si c’est à cause des anges :
"C'est pourquoi la femme, à cause
des anges, doit avoir sur la tête une marque de l'autorité dont elle
dépend" (1 Corinthiens 11:10)
C'est ici le
seul verset de la Bible mettant en corrélation le port du voile et les
anges. Il n'en demeure pas moins présent, et comme il n'est pas question
de supposer qu'une "erreur" se soit glissée dans la Parole du Seigneur,
alors examinons les différentes interprétations possibles :
1)
Traditionnellement nombreux théologiens identifient les anges aux
responsables spirituels de l’Eglise (Ephrème, Ambrosiaste...) tandis que
Thédoret de St-Cyr et d'autres y voient les « anges gardiens. La première
interprétation simplifierait beaucoup la compréhension de ce texte
énigmatique, nous retrouverions la même conclusion que pour le du point
précédent.
Mais quand
Paul parle des chrétiens il n'utilise jamais ce mot « anges », mais celui
de « saints ». On comprendrait mal pourquoi, ici, il utiliserait un
vocabulaire ambigu.
Si nous
voulons cependant suivre cette thèse, et accréditer que c'est à cause des
"responsables" que la femme devait porter le voile, la seule signification
que nous pourrions avancer et celle de l'obéissance à la discipline de
l'église. Ce qui revient à dire que si la règle change, il ne devient plus
nécessaire de porter le voile. Parce qu’alors dire le contraire serait
mettre en valeur la tradition. Or, l’important ce n'est pas la tradition,
la forme, mais l'obéissance, le fond.
Quel intérêt
les responsables auraient-ils à infliger aux femmes de l’Eglise des règles
de « bienséances » devenues caduques ?
2) Jean
Héring dans son commentaire de l'épître suppose que Paul pourrait faire
allusion au récit de Genèse 6 sur la tentation des anges séduits par la
beauté des femmes. Le voile étant là pour ne pas induire les anges en
tentation.
Ce n’est pas
sérieux, il nous semble difficile d'accepter cette thèse. Je vois mal les
anges mettrent leurs deux mains devant leurs yeux quand la femme prend sa
douche. Sous cet aspect des choses, le voile ne représente plus grand
chose …
Cependant, ne
pourrait-on pas comprendre qu'il s'agirait peut-être de séductions non pas
« physiques » mais « spirituelles » ?
En effet, la
louange sort l'être humain de son carcan terrestre pour lui ouvrir le
monde céleste.
"Je te
célèbre de tout mon cœur, Je chante tes louanges en la présence de Dieu."
(Psaumes 138:1)
Ce texte
montre combien c'est pendant le culte, personnel ou collectif, que l'on
est plus que jamais en contact avec le monde spirituel.
Alors, il y a
deux façons de comprendre le sens de cette possible séduction :
a) La femme
créée soumise à l'homme, d’abord à son père puis à son mari, peut s'élever
de sa situation à une autre situation bien supérieure à la sienne, pendant
le temps de la louange.
b) Quelques
uns y voient un signe de la puissance maritale, c'est à dire une marque
montrant que la femme mariée est "intouchable". Mais comment supposer que
la protection ne concernerait que les femmes mariées et non les jeunes
filles vierges ? Les anges (mais alors quels anges ?) pourraient-ils être
tentés plus par les femmes mariées que par les jeunes filles ? On
divague !
D’ailleurs,
le texte qui suit nous montre bien que les jeunes filles elles aussi
peuvent être concernées par ce contact avec le monde spirituel,
puisqu'elles prophétisent:
"Nous partîmes le lendemain, et
nous arrivâmes à Césarée, étant entrés dans la maison de Philippe
l'évangéliste, qui était l'un des sept, nous logeâmes chez lui. Il avait
quatre filles vierges qui prophétisaient." (Actes 21 : 8-9).
Il me parait
plus cohérent, si l'on veut examiner cette hypothèse, de comprendre que
pour les anges, il serait moins tentant pour leur propre condition,
d'accepter qu'une femme puisse s'élever de son rang initial pour rejoindre
ou même dépasser celui des autres (son mari et les hommes en général) si
en même temps elle revêt volontairement un symbole rappelant sa
soumission... Il me semble que cette nuance reste cependant peu flatteuse
pour les anges, car elle supposerait une part d’orgueil incompatible avec
la pureté céleste !
La femme,
l’épouse, marquerait de la sorte que cette "aspiration" spirituelle qui
l'élève de sa situation, n'est qu'un moment passager, et que d'avance elle
accepte le retour à sa position initiale de femme soumise. Mais, qui peut
se réjouir que l’élévation spirituelle ne soit que passagère ? A part les
anges déchus… Quelle conception nous ferions-nous donc des anges ?
Nous faisons
donc deux conclusions sur cet aspect de l’interprétation :
v
Il
me semble donc qu'il ne peut pas s'agir d'une tentation d'ordre physique
mais uniquement d'une attitude spirituelle. S'il s'agissait de tentation
physique, bien d'autres circonstances de la vie quotidienne exposeraient
davantage la femme (sauf dans l'interprétation mentionnée en point 3, mais
bien peu vraisemblable).
v
D'autre part la théorie d'une tentation spirituelle, semblable à la
révolte des anges qui ont suivi Satan, si elle peut s'expliquer puisque
Lucifer en a montré la voie, devrait alors concerner toute la création et
pas seulement la femme. L'homme aussi, merci Seigneur, sait rencontrer
son Dieu dans l'élévation de l'Esprit (c'est la principale raison du
parler en langue : parler à Dieu en esprit). En quoi la séduction
spirituelle serait-elle différente selon qu'il s'agit d'une femme ou d'un
homme? Cette thèse ne tient assurément pas à l'analyse.
3) Héring
mentionne qu'il pourrait aussi s'agir d'une tradition helléniste d'après
laquelle « les femmes en extase" étaient des proies faciles pour certains
esprits capables de provoquer des cas de possessions. Alors ce serait bien
la femme qui serait à protéger contre certains anges démoniaques, et non
plus les anges à protéger de la tentation.
Mais
rappelons qu'il s'agit d'une tradition helléniste, d’origine païenne, et
je vois mal l'apôtre Paul faire référence à cette croyance païenne pour
construire son argumentaire !
4)
L'irritation de Paul explique probablement cette énigme... et une
autre, non moins troublante concernant la femme :
"Si quelqu'un se plaît à
contester, nous n'avons pas cette habitude, non plus que les Eglises de
Dieu." (1 Corinthiens 11:16)
et,
"que les femmes se taisent dans
les assemblées, car il ne leur est pas permis d'y parler; mais qu'elles
soient soumises, selon que le dit aussi la loi." (1 Corinthiens 14:34)
Rappelons que
peu de temps avant, le même Paul écrit :
"Toute femme, au contraire, qui prie ou qui
prophétise, la tête non voilée, déshonore son chef: c'est comme si elle
était rasée." (1 Corinthiens 11:5)
C'est à dire
qu'il reconnaît à la femme le droit de prier et de prophétiser,
sous la réserve que nous étudions ici.
Il n'y a pas
contradiction. D'ailleurs de nombreux versets démontrent que les femmes
participent activement aux cultes rendus à Dieu.
v
La position que prend Paul apparaît donc comme une mesure disciplinaire, à
l'encontre de certaines femmes « émancipées », qui contestent aux maris la
direction du couple, et qui perturbe la sérénité de l’Eglise par la
contestation permanente.
Ce sont à ces femmes-là que s’en prend l’apôtre
Paul.
D'abord il
argumente. Il est plus que probable que d'autres débats ne nous sont pas
rapportés par les textes. Les responsables de l'église locale ont
certainement eux aussi essayé à maintes reprises de convaincre ces
femmes.
Mais selon
les habitudes de leur culture, certaines femmes continuent cependant à
refuser la marque de la suprématie du mari dans le couple. La chrétienne
d'origine juive accepte sans problème, c'est dans sa tradition, mais celle
d'origine grecque se rebiffe.
Paul ne
réussissant pas à faire retomber les passions ordonne le silence, à
cause de ce contexte.
Mais les
anges là-dedans ?
Je suppose
que Paul fait référence à la chute de Satan quand il discutait contre
Dieu. C’est alors un triste spectacle de révolte qui s'est déroulé devant
les anges qui furent ébranlés et entraînés pour beaucoup d’entre eux dans
la désobéissance.
Il s’agirait
donc dans cette affaire de contestation du même schéma de désobéissance
pouvant, bien sûr à une petite échelle locale, avoir la même suite que la
rébellion des légions de Satan. C’est à dire la perte de certaines âmes.
v
Conclusion sur la relation avec les anges :
Si le problème est bien celui de
la désobéissance à Dieu pour ce qui concerne les anges, il s'agit d'un
problème de désobéissance à l'église pour ce qui concerne la femme sans
voile, à cause de la règle en vigueur.
Désobéissance, il faut le noter
à propos d'une coutume. C'est à dire sur quelque chose qui peut
évoluer dans le temps. La coutume de porter le voile à cette époque
revêtait une importance que nous évaluons mal dans notre société. Mais
qui à Corinthe, il faut s'en souvenir pour bien comprendre l'intervention
de Paul, était la cause d'un climat de révolte incompatible avec la paix
qui doit régner dans l’assemblée.
Il s’agit là d’une situation qui
était, et qui demeure, inacceptable dans l'Eglise.
Nous comprenons donc que ce n'est
pas à cause des anges qu'aujourd'hui l'épouse devrait donc se parer d’un
second voile, ces voiles n'étant qu'une tradition. Par contre il est tout
à fait possible de comprendre que les anges puissent être inquiets du
refus d’obéissance, eux qui connaissent les conséquences désastreuses de
la rébellion…
Ø
La conclusion logique qui s’impose est donc que si la règle de l’Eglise
n’oblige pas la femme à porter le voile, elle n’a aucune raison de le
porter. Mais si, la règle de l’Eglise est de le porter alors, elle doit se
soumettre.
Mais, la bonne question reste de
savoir pourquoi l’Eglise d’aujourd’hui imposerait cette règle, si ce n’est
ni à cause du mari, ni à cause des anges ?
III – Si c’est à cause de Dieu :
"Il n'y a
plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni libre, il n'y a plus ni
homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus-Christ." (Galates 3:28)
"Car que sais-tu, femme, si tu
sauveras ton mari ? Ou que sais-tu, mari, si tu sauveras ta femme ?" (1
Corinthiens 7:16)
Il semble que
ces textes sont suffisamment limpides pour ne pas devoir être
paraphrasés.
Conclusion sur la relation avec le
Père :
Ø
De
toute évidence le Seigneur ne fait pas cas d'une différence entre hommes
et femmes pour ce qui Le concerne. Cette évidence nous oblige à admettre
qu'il n'y a pas de raison de porter les voiles à cause de Lui.
Ø
Si
Dieu ne fait pas de différence entre le chrétien et la chrétienne, l’homme
n’a pas autorité pour interdire à la femme d’enseigner, sauf pour raison
d’obéissance à une règle d’Eglise.
Conclusions :
Alors, si ce n'est pas pour Dieu, si n’est plus
pour le mari et nous l'avons vu ni pour les anges que la femme doit porter
les voiles, tout simplement parce que le problème soulevé ne concerne pas
le visible, mais la désobéissance à la règle de l'Eglise, nous pouvons
donc affirmer que ce problème ne nous concerne plus.
Je voudrais
aussi rappeler que le Seigneur est venu pour nous libérer du joug de la
loi. L’homme a reçu « cinq sur cinq » qu’il était affranchi par exemple de
la circoncision. Pourtant notez le comportement de l’apôtre Paul lorsqu’il
décide d’emmener Timothée avec lui, que fait-il ? IL LE CIRCONCIT.
Pourquoi fait-il cela lui qui prêche que la circoncision du corps n’est
rien pour le chrétien, que nous sommes libérés de cette marque ?
« Paul voulut l’emmener avec lui; et,
l’ayant pris, il le circoncit, à cause des Juifs qui étaient dans
ces lieux-là, car tous savaient que son père était grec. »
Actes 16.3
Voilà, il faut choisir : ou dire que Paul se
contredit ou réaliser que pour le témoignage auprès des juifs il fait
soumettre Timothée à la tradition afin de ne pas ajouter un obstacle à
la prédication de l’Evangile. Paul est
parfaitement cohérent en faisant un acte qu’il sait inutile en matière
de salut, mais utile pour la paix des esprits de ses interlocuteurs
juifs. Nous sommes dans le même cas de figure qu’en ce qui concerne le
voile pour la femme.
Alors, je
pose la question : Mes frères qui voulez imposer le voile à la femme, êtes
vous prêts à votre tour à vous faire circoncire ? Curieusement je n’ai
jamais entendu un homme revendiqué cette chose…
La tradition
a changé, son objet donc s'éteint. Mais ce qui demeure, et demeurera
toujours d'actualité, c'est l’enseignement de Jésus donné à la
Samaritaine, et qui nous concerne tous :
"Mais l'heure vient, et elle est déjà
venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité;
car ce sont là les adorateurs que le Père demande." (Jean 4:23)
Je garde un
souvenir amusé de cette jeune femme très « moderne » qui venait aux
réunions de prières sur sa moto, une « trial », jonglant entre les
voitures et n’hésitant pas à franchir la ligne blanche, et une fois
arrivée s’empressait de mettre son voile pour la prière.
Mais je me
souviens aussi de quelques femmes qui avaient l’habitude de se mettre au
premier rang dans l’assemblée, et qui à l’époque portaient haut la mini
jupe, comme j’aurais préféré qu’elles mettent le voile sur leurs cuisses
plutôt que sur leur tête…
Voile ou pas
voile, là n'est pas la vraie question. La vraie question reste celle-ci : "Comment adorons-nous notre Dieu ?" Le
légalisme est contraire à l'Esprit.
Ce qui serait dramatique ce serait que l'église
créée une nouvelle loi au sujet du voile ou de tout autre retour au
« légalisme », comme le port du pantalon pour les femmes ou de la longueur
de leurs cheveux ou de leurs vêtements... ou de toutes autres règles qui
n’auraient comme seule conséquence que de déstabiliser les plus faibles
et de placer les chrétiens, si par malheur ces décisions venaient de
l’Eglise, en d'un conflit d'obéissance,
ce qui
transformerait de faux problèmes en vrais péchés... par
la faute des pasteurs ou des anciens et dont ils auraient à rendre
compte.