Lorsque
Jésus affirme que les adorateurs que le Père demande sont ceux qui
l’adorent « en esprit et en vérité » il semble évident que Jésus
pense aux « pharisiens » de tous les temps. Il avertit tous ceux qui
se considèrent comme des propres justes, mais qui en réalité, sont
aux antipodes de ce que Dieu veut. Il dénonce ceux qui se présentent
comme des hommes de foi, mais qui modifient à leur convenance le
sens même de l’adoration.
Les
pharisiens existent encore. Ceux des temps modernes sont devenus
ceux qui prétendent servir Dieu, et qui tout comme leurs ancêtres,
sont des obstacles à l’action de son Saint-Esprit.
Rappelons-nous
que Jésus nous a libérés de la loi, en nous réconciliant avec le
Père, par son sang. Non seulement Il nous a rachetés, mais Il a
permis que nous devenions des enfants, fils et des filles adoptifs
de Dieu. Cette liberté, face à la loi, n’est possible que dans la
mesure ou le racheté prend conscience de sa propre responsabilité
dans le plan du Seigneur. Conscient, veut aussi dire agissant en
conséquence, ce qui n’est pas toujours le cas.
Le
chrétien est rendu libre, mais pas pour faire n’importe quoi ! Comme
il semble plus facile d’exercer le dirigisme, plutôt que d’enseigner
le sens de la responsabilité ou même d’évoluer soi-même dans un
cadre de vie réglé par d’autres, la tentation est souvent forte
d’établir et de suivre de nouvelles règles.
Mais
quand ce cadre devient une règle incontournable, dont on n’hésite
pas à se servir pour exclure celui qui ne s’y soumet pas, on sort
bien entendu de l’Esprit de l’Evangile. On cherche à imposer ce qui
ne vient, en réalité, que de la volonté de l’homme.
Ainsi,
nous détournons la vérité, comme les pharisiens l’ont fait, pour lui
donner un sens qui nous agréé, mais qui ne correspond pas forcément
à la volonté du Seigneur. Cela se fait par concession à la
facilité.
A cette
dérive s’ajoute celle de l’incompréhension ou d’une interprétation
différente du message du Seigneur.
Il est
difficile d’admettre que nous aurions pu mal comprendre un
enseignement. Bien sûr nous affirmons à qui veut l’entendre notre
« ouverture » et notre « objectivité ». Mais nous établissons des
barrières, qui ne sont rien de moins que de nouvelles traditions.
Nous nous référons à telle ou telle doctrine bien établie, pour
refuser d’entendre ce que le Saint-Esprit voudrait nous dire.
Quand
nous y regardons de plus prêt, nous pouvons nous demander si
l’important est bien ce qui est écrit dans la parole de Dieu ou si
c’est que nous en avons compris à un moment donné. C’est tellement
vrai, qu’un chrétien qui évolue dans sa foi est vite soupçonné de
n’être pas « stable ». Tout se passe comme s’il fallait que la
conviction du nouveau converti soit figée, assez vite après sa
rencontre avec le Seigneur.
L’écoute
personnelle de Dieu est trop souvent anesthésiée dans nos vies. La
conséquence est que notre marche avec Lui est freinée. C’est parfois
l’œuvre des nouveaux pharisiens, et, du carcan qu’ils imposent aux
fidèles. Mais soyons lucides c’est plus souvent encore le résultat
d’une paresse spirituelle du chrétien lui-même. La foi
intellectuelle étant plus reposante que la foi qui nous fait entrer
en action ! Il est évident que l’homme se laisse plus facilement
entraîner vers le laxisme, que vers l’effort.
Ceci est
une réalité permanente, déjà vraie à l’origine de l'Eglise, mais
déjà vraie sous la première alliance. Ce qui a conduit certains vers
ce pharisaïsme décrié par Jésus, parce qu’il ne correspond pas à une
réalité profonde, à un changement de fond, mais seulement à la forme
et à l’apparence.
C’est le
piège dans lequel nous risquons de tomber, car c’est celui de la
facilité. Nous pensons éviter les problèmes en fixant de nouvelles
balises. Dieu veut que ce ne soit plus par contrainte ou même par
effort que nous fassions sa volonté, mais naturellement, parce
que nos désirs auront changé, c’est tout autre chose.
« Pneuma », le mot grec qui désigne la pensée, signifie aussi le
principe vital qui « anime » le corps. On voit très bien le lien
étroit entre « esprit » et « vérité », entre pensées et actes,
l’interaction. Nos actions sont suggérées par notre pensée, mais nos
pensées peuvent rester, telles de bonnes intentions, de simples vœux
pieux, stériles dans les faits.
« Alethia »
qui est traduit par vérité, implique la notion de liberté. Elle
s’exerce quelles que soient les circonstances. La vérité qui
s’exprime non seulement dans notre conviction, mais qui est une
réalité vécue.
Si le
chrétien que nous prétendons être n’est pas animé par cet ensemble,
esprit et vérité, pensées et actes concordants, mais seulement soit
par les apparences, comme le prophète Esaïe en dénonce un exemple
(Esaïe 29 : 13-16), ou seulement par les œuvres, donc stériles selon
Jésus (Luc 18: 9-14), alors, dans cette situation, force est de
constater nous ne sommes pas des chrétiens régénérés, mais des
chrétiens « inachevés ».
La
solution pour devenir ce chrétien régénéré voulu, par Dieu, est
relativement simple dans son énoncé :
André
Chouraqui traduit Jean 4 : 23 par « l’heure vient, c’est
maintenant, où ceux qui se prosternent en vérité se prosterneront
devant le Père dans le souffle et la vérité... » On comprend bien
que c’est l’Esprit de Dieu qui met en marche le chrétien. L’action
est indissociable de l’adoration. C’est ainsi que nous porterons de
bons fruits.
Seule
cette démarche va parachever le chrétien balbutiant pour faire de
lui un chrétien régénéré, c’est à dire comme l’annonce Jésus (Jean 3
: 3), né de nouveau, par l’action du Saint-Esprit (Eph. 4 : 17-32),
avec comme conséquence, cette merveilleuse promesse d’être scellé
par le Saint-Esprit, c’est à dire inscrit dans le Livre de Vie.
Jésus
nous dit que tous n’entreront pas dans le royaume des cieux, et
comme les vierges folles de la parabole, certains diront
« ouvre-nous » ceci après l’avoir longtemps attendu. D’autres diront
« nous avons fait des miracles en ton nom ». L’enseignement de Jésus
est catégorique, malgré une certaine foi, malgré quelques actes
spectaculaires, le salut ne leur est pas accordé.
Qu’on ne
s’y trompe pas, l’inscription dans ce Livre de Vie ne concerne pas
automatiquement ceux qui sont baptisés, dont certains abandonnent la
foi ou n’ont que l’apparence de la piété. Pas plus d’ailleurs ceux
qui manifestent des dons spirituels. Cette inscription concerne
uniquement ceux qui sont « nés de nouveau », qui adorent le Seigneur
en Esprit et en Vérité.