Point de vue sur
les Apparitions Mariales de FATIMA
(par pasteur Gérard
Sadot)
"Il
viendra un temps où les hommes ne supporteront plus la saine doctrine,
mais au gré de leurs propres désirs, avec la démangeaison d'écouter,
ils se donneront maîtres sur maîtres, ils détourneront l'oreille de la
Vérité
et se tourneront vers des fables"
(L'apôtre Paul, 2Timothée 4: 3/5)
Les deux
mamelles des guérisons miraculeuses sont souvent, hélas, l’hystérie
et
l’escroquerie. De simples manifestations d’hystérie collective ou des
faits invérifiables sont considérés comme miracles. Hélas, souvent c’est un
coup de marketing habile. Le sommeil de la raison engendre souvent des
monstres cornus et bien des entourloupes. Aujourd’hui, il y a toutes sortes
de miracles, qui attirent les foules en extase, et qui deviennent des
industries florissantes.
L’affaire "Paul Gardey de Soos"
Paul
Gardey de Soos, toulousain dont le nom signifie "Gardien de Dieu" (en
gascon). Âgé de 72 ans, et membre du groupe dit de "l’Olivier" (rattaché au
Mouvement charismatique), Paul Gardey de Soos, ancien assureur n’avait pas
besoin de miracle pour ancrer sa foi. "Si je n’a pas été tué alors que je
tentais de m’évader, pendant la guerre, c’est grâce à Marie" dit-il.
Depuis le 11 février 90, un divin prodige se renouvelait chaque jour. Une
icône qui était sur sa cheminée exsudait de l’huile aux senteurs orientales.
Paul disait: "Cette
date n’est pas sans signification. C’est un 11 février que la Vierge est
apparue pour la première fois à Bernadette Soubirous, dans la grotte de
Lourdes". Et
chaque fois que Paul téléphonait à Beyrout, l’image divine suintait plus
fort ! Quelques gouttes d’huile au parfum de jasmin suintèrent des yeux de
la Vierge et des trois petites étoiles qui ornent son voile. L’icône avait
été achetée en 84 "pour une poignée de centimes"... Et pendant 6 ans, cette
image pieuse n’a rien fait. Mais le 11 février, elle fut placée dans une
coupelle en inox afin de ne pas perdre une goutte d’huile mariale.
De quoi se compose cette huile miraculeuse ? Paul Gardey s’oppose à ce qu’on
vienne tripoter la sainte image, fût-ce dans un but scientifique. 10000
pèlerins ont défilé chez lui en trois mois. Ils viennent de partout, du Sud
Ouest, du Nord, et de la très catholique Espagne.
Pour l’archevêché :
"Mr.
Gardey de Soos est un chrétien sérieux"
Toutefois, l’Eglise catholique reste prudente et ne veut pas se
compromettre. Les autorités ecclésiales venaient de se faire échauder.
Apparitions de la
«
Vierge » à Fréchou
L’évêque d’Agen, Msg
Sabin de Saint Gaudens,
a dû dénoncer publiquement deux prétendus "évêques" auto-consacrés. Ils
avaient concocté une lucrative "apparition" régulière de la Vierge, une fois
par mois, dans un petit bois près de Fréchou en Lot-et-Garonne. Puis, ils
ont fondé une "Communauté des serviteurs et servantes de Notre Dame"
dont la principale activité est de plumer les pèlerins d’ailleurs
consentants.
L’un des témoins, Odile
Obodo, affirme sous serment que la Sainte Vierge avait "rempli
son réfrigérateur de victuailles".
Le principal plaignant, un nommé Seigneur, reste convaincu que la générosité
divine remplissait son réservoir d’essence... Le seul miracle authentifié
reste cependant la multiplication des billets de banque (7 millions de
francs en 5 ans) qui a conduit tout droit les fondateurs de la communauté en
correctionnelle...
Pour revenir à l’icône
de Paul Gardey de Soos, il faut savoir que Paul avait déjà eu affaire à la
justice pour une affaire de détournement de fonds. Le "Gardien de Dieu" a du
fermer la boutique le 23 mai et est parti pour une destination inconnue. Les
fêtes de l'Ascension risquaient en attirant les foules, de salir sa
moquette.
"Les roses éternelles de la Madone"
Vous avez aussi entendu
parler des "roses éternelles de la Madone"? Juste après la seconde
guerre mondiale, à Heaton Norris le monde catholique était bouleversé. En
effet pendant trois ans, les fleurs que tenait la statue de la Vierge ne se
sont jamais fanées... Miracle! En 1985, l’ex-enfant de choeur Arthur Clarke
révèle qu’il venait chaque nuit renouveler le bouquet pour financer les
travaux de rénovation de l’église!
ET LES APPARITIONS A
FATIMA ?
Tout a commencé le 13 octobre 1917. Il y avait 70000 spectateurs. Pour la
6ème fois, la Vierge apparaît en tenue de lumière à trois petits bergers. Le
soleil se met à danser selon les milliers de spectateurs... Mais, la plupart
ne voient rien qu’un astre qui joue à cache cache avec les nuages. Ce
village de Fatima doit son nom à une fille de Mahomet. La région de Leira, à
mi-chemin entre Lisbonne et Porto, a toujours été fertile en miracles... A 8
km de Fatima un village porte le nom de Milagres (miracles). Rien que dans
la circonscription de Vila Nova, de Ourem, on recense 9 apparitions de la
Vierge. Le diocèse de Leira a opposé une résistance acharnée à la loi de
séparation de l’Eglise et de l’Etat, promulguée en 1911 par le
nouveau régime républicain.
Voici ce que déclarait
le "pieu" abbé José Perreira de Lacerda (qui sera le premier à mettre en
forme les récits des trois bergers): "La rénovation que cette guerre va
imposer au monde et surtout à la vieille Europe, vermoulue de vice et
détournée par l’idéologie démocratique de sa tâche essentielle dans le cours
de la civilisation chrétienne, doit agir puissamment dans notre Portugal,
bastion de l’Occident".
La conversation
rapportée ci-dessous a eue un témoin, un aumônier militaire, le père
Fernando da Silva qui, perplexe et un peu scandalisé, la rapporte à un de
ses amis, un célèbre psychiatre, le Dr. Luis Cebola. L’ébauche de la
machination est aussi connue à Lisbonne avant même les apparitions de
Fatima.
Abel Ventura do Céu,
prieur du couvent de Cieça, l’un des organisateurs de la désobéissance
civile (après la loi de séparation).
L’abbé Benvenuto de
Sousa, qui rêve d’un nouveau Lourdes.
Le troisième est le
jeune curé de Fatima, Manuel Marques Fereira, morose: "Il ne se passe
jamais rien. La région est pauvre, la terre peu productive, les gens
misérables, sans initiative".
L’abbé Benvenuto de
Sousa saisit l’occasion: "Je connais un moyen d’enrichir rapidement votre
paroisse: une apparition comme celle de la Salette ou de Lourdes".
Le petit curé
réfléchit: « Vous avez raison. Le milieu s’y prête bien ».
C’est comme ça que
trois ecclésiastiques de la région ont commencé à "dessiner la main de
Dieu" dès mai 1914.
Le 13 mai 1917, la
Vierge apparaît sur un chêne vert. Mais, c’est le mois de Marie. Le 13,
chiffre majeur de la superstition. L’ancien recteur du sanctuaire de Fatima
(Luciano Guerra) a dit: "La Sainte Vierge connaît les portugais; sachant
qu’ils sont pauvres et doivent coucher à la belle étoile, c’est à la belle
saison qu’elle est apparue".
Justement, il y a trois
petits pastoureaux qui font paître leurs moutons. C’est un dimanche. Il est
midi et aucun paysan n’est au travail dans les champs à cette heure là.
Lucia a 10 ans au moment du miracle, ses cousins germains, Francisco et
Jacinta, 9 ans et 7 ans. Elle est la fille d’un paysan alcoolique "Abobora"
(citrouille) qui prie surtout Bacchus... La photo prise le lendemain des "apparitions"
par un amateur montrent qu’ils sont porteurs d’une lourde hérédité. Une
autre photo retouchée lui sera substituée à usage de la presse. Puis, on
confectionnera un photomontage destiné à rester dans les siècles des siècles
où les enfants poseront en costume folklorique local avec la Vierge encadrée
dans un chêne auprès de jolis petits moutons.
Toute apparition devant
être interprétée comme un signe du Ciel en faveur de la monarchie. Hernani
Dias Amado, professeur d’histologie à la Faculté de médecine de Lisbonne,
témoin de l’époque, rapporte que des prêtres avaient demandé à l’épouse du
colonel Genipro, de passage dans la région de Fatima de jouer les
apparitions. Sa silhouette fine, élégante, et inconnue du surcroît, en eût
fait une Vierge idéale. La dame refusa.
Première
apparition (13 mai 1917)
Lucia dialogue avec
l’apparition:
De quel endroit est
Madame ?
Mon endroit est celui
du Ciel.
Que vient faire Madame
en ce monde ?
Je viens pour te dire
que tu viennes ici tous les mois et, au bout de six mois, je te dirai ce que
je veux.
"Elle porte, dit
Lucia, un vêtement blanc descendant jusqu’aux pieds et sa tête est
couverte d’un voile... elle a de petits pendants d’oreilles en or".
La fillette évoque "une
poupée très jolie qui a une auréole sur la tête et l’appelle d’une voix
fluette et mélodieuse" (O Seculo, 23 Juillet 1917).
Elle mesure environ
1,10 m, comme sa copine Virginie. Elle parle sans remuer les lèvres.
Fancisco, lui, dit
qu’on ne voit pas ses oreilles, couvertes par le voile.
Deuxième
apparition (13 juin)
Que veut Madame ?
Je veux que tu
reviennes ici le 13 et que tu apprennes à lire pour que je te dise ce que je
veux.
On objectera qu’il
n’est pas nécessaire de savoir lire pour entendre. Au bout des six mois,
Lucia n’aura pas appris à lire.
Troisième
apparition (13 juillet)
La première en public.
5000 personnes. Seuls les trois pastoureaux "voient".
Que veux Madame ?
Je veux que tu
reviennes ici le 13. Dis ton chapelet à Notre Dame du Rosaire pur qu’elle
calme la guerre. Elle seule peut le faire.
Incident
: le père de Lucia, ivre mort, s’en prend à la foule qui a envahi son lopin
de terre. Il est bousculé. Plus tard, Lucia, Fancisco et Jacinta affirmeront
qu’ils ont reçu ce jour-là un secret, le fameux secret de Fatima.
Quatrième
apparition (19 août)
Les pouvoirs publics,
préoccupés par les manifestations religieuses et par l’intention déclarée de
transformer la Cova de Ira en un second Lourdes, font amener les enfants à
la sous-préfecture où on les interroge. Un médecin les examine.
Le père de Lucia,
Abobora, dit au sous-préfet: "Ne croyez pas ma fille, c’est une menteuse".
Vingt ans plus tard,
Lucia imaginera la fable dite de "la friture": elle et ses cousins auraient
été interrogés par le préfet près d’une grande bassine d’huile qu’il aurait
fait chauffer en menaçant de les y faire frire s’ils ne disaient pas la
vérité. La littérature fatimiste en sortira une scène épique digne des
premiers martyrs chrétiens.
Cinquième
apparition (13 septembre)
25 à 30000 personnes
sont venues demander la guérison d’un malade ou l’assurance qu’un défunt ira
au Ciel. Certains confient à Lucia des lettres pour la Vierge.
- Que veut Madame ?
Personne ne voit ni
n’entend rien.
Sauf une dame de la bonne société, Maria do Carmo Menezes:
"J’ai vu tomber
beaucoup de pétales de rose, ils sortaient du soleil en grande quantité.
Là-haut, ils étaient grands, mais en se rapprochant de nous, ils devenaient
petits et s’évanouissaient. Un de ses pétales tomba sur mon épaule gauche.
Je voulus le prendre avec les mains mais il n’y avait plus rien".
Le frère de cette dame, le marquis da Cruz, académicien, trouve là
l’inspiration d’un exécrable livre de poèmes dont la couverture est
illustrée par... une photo de la pluie de fleurs. Plus tard, un
ecclésiastique confessera le trucage.
Sixième
et dernière apparition (13 octobre)
70000 personnes.
L’apothéose. Entre deux apparitions, les enfants ont été invités à passer
quelques jours chez les inventeurs de la pluie de fleurs. Pour être mis
en condition ?
Un chanoine écrira: "Les
curieux poursuivaient les enfants. En voyant cette affluence, la généreuse
hôtesse dit aux fillettes: Mes enfants, si le miracle ne se produit pas, ces
gens sont capables de vous brûler vives".
Les petites n’avaient
plus qu’à bien se tenir. Elles ont passé leurs habits du dimanche. Une
aristocrate leur a tressé des couronnes de fleurs artificielles. Un arc de
triomphe a été dressé devant le chêne.
- Que veut Madame ?
Ce jour-là, la Vierge
invite les justes à faire pénitence pour les pécheurs et la conversion de la
Russie.
Mais, Lucia
commet une étourderie. Elle prête à la bouche
immobile de l’apparition une absurdité:
"Quand je remonterai au Ciel, la guerre sera finie".
Il s’en faudra de 18
mois! Une gaffe que les fatimistes acharnés mettront 1/4 de siècles a
réparer. Bien plus tard, en 1924, Lucia prétendra avoir mal comprise les
propos de la Vierge qui aurait dit en réalité: "Convertissez-vous afin que
la guerre finisse dans un an".
Après coup...
Lucia dit à la foule de regarder le soleil car "on
y voit Joseph et ensuite Notre Seigneur".
La foule regarde et ne
voit rien. Une photo prise à ce moment montre l’immense assemblée humaine
contemplant le Ciel dans une attente déçue. La pluie battante prend fin et
des jeux de lumière s’ensuivent dans un ciel saturé d’humidité.
Il y a eu un phénomène
classique: On voudrait avoir vu, on se dit qu’on a vu, on le répète. Parmi
les "voyants", personne n’a vu la même chose. Pour l’un le soleil était
auréolé de jaune et de pourpre, pour l’autre il est passé du jaune au bleu
et puis au blanc, pour un troisième, il était gris acier, pour un autre
encore, irisé comme une perle. Certains ont cru voir "une sorte d’avion". La
plupart n’ont rien vu du tout.
L’écrivain et ancien
ministre de l’Education Nationale, Antonio Sergio témoigne:
"Quand le soleil apparut, il y avait de légers nuages qui s’accrochaient
à lui et qui, sous l’effet de l’orage, s’animaient de mouvements giratoires
qui n’avaient rien de merveilleux. Je vis une chose beaucoup plus
significative: la foule, dévote, impressionnée par les cris de Lucia, tomba
à genoux. Quand elle se releva, une dame élégante dit à haute voix,
plusieurs personnes l'entendirent: Et maintenant qu’Alfonse Costa vienne un
peu par ici".
Alfonso Costa est le
chef du gouvernement anticlérical de l’époque. Très vite, aux élections qui
surviennent à Leira d’abord, à Lisbonne ensuite, les forces démocratiques
battent de l’aile devant le regain de popularité des catholiques
monarchistes revigorés par le coup de pouce du Ciel. Salazar arrive au
pouvoir en 1926.
Lors des premiers
interrogatoires, les petits cousins de Lucia, évasifs, répondent par le
silence ou par un "je ne me souviens pas". Les enfants, c’est une
hypothèse, sans être objectivement complices, ont très bien pu "jouer à la
poupée" avec une statue qui leur parlait (sans remuer les lèvres) et
continuer parce que le jeu faisait d’eux les héros auprès des adultes.
Fait troublant,
tous les esprits neutres, scientifiques, qui se livreront à des enquêtes
fouillées, seront persécutés plus tard par la police politique de Salazar.
Les faits relatés dans
la première vulgate de Fatima paraissant sans doute trop grossiers, même
pour le... vulgum, la seconde vulgate de 1938 les revoit et le corrige. Elle
accorde aux deux bergers des dons merveilleux, une haute conscience
intellectuelle et morale, en fait d’habiles théologiens. Nécessité fait foi.
Le conte de fées, revisité, est désormais bouclé. D’autant mieux qu’en 1919
et en 1920, peu de temps après les événements, les deux cousins, Francisco
et Jacinta, meurent, l’un de la grippe espagnole, l’autre plus
mystérieusement. S’il est vrai que la grippe fait à l’époque des
millions de morts en Europe, la succession des décès est troublante. Car,
le père et la mère de Lucia disparaissent eux aussi, et une soeur...
Beaucoup de disparitions pour quelques apparitions. Le rapport de
certains médecins disparaîtra lui aussi, des archives sous le régime de
Salazar. Certains fatimistes reconnaissent que ces morts sont
suspectes.
Le chanoine Casimir
Barthas rapporte l’opinion souvent émise à l’époque dans la région:
"Il fallait faire
disparaître ces petits qui auraient fini par dévoiler la comédie. Il faudra
qu’ils s’en aillent tous, les enfants, et les parents. Tant qu’il restera
quelqu’un de vivant, l’affaire ne pourra pas marcher".
Les directeurs de
conscience des enfants devenus saints les ont astreint à un régime de fer
afin de complaire au Seigneur par leurs sacrifices, les exhortant par
exemple, à se priver de boire ou de se soigner "pour la conversion des
pécheurs".
Lucia, la principale
héroïne vivra. Elle vit toujours, tout en étant si peu de ce monde... (Elle
avait 83 ans en 1990). Elle a traversé les époques cloîtrée, totalement
escamotée par les pouvoirs publics et religieux. En 1921 à l’âge de 14 ans
qu’on sait dangereux pour les filles, elle est enfermée dans un couvent de
Porto sous un faux nom, trimballée dans un couvent en Espagne, puis, de
retour au Portugal, enfermée au carmel de Coimbra où elle se trouve encore
aujourd'hui. Malgré les prières réitérées du journaliste Patrick Sery, la
porte du carmel est restée fermée. La dernière interview remonte à 1957. A
un ecclésiastique mexicain, le père Fuentes, Lucia révéla que la Vierge lui
était une nouvelle fois apparue et lui avait annoncé un immense châtiment,
quasiment la fin du monde pour 1960. Fâcheuse prédiction qui rappelle
l’annonce prématurée de la fin de la guerre. On comprend mieux qu’il soit
devenu impossible d’approcher Lucia.
Ce n’est qu’en 1922 que
Mgr Correia da Silva commande l’ouverture d’une enquête canonique. La raison
principale est que l’autorité religieuse suprême du Portugal, le
cardinal-patriarche de Lisbonne, Mendes Belo, homme intelligent et cultivé,
refuse de couvrir une opération qu’il considère comme une imposture. Il
meurt en 1929, remplacé par le cardinal Cereijeira, ami intime de Salazar.
La promotion, les affaires, peuvent commencer. Les apparitions sont
proclamées dignes de foi en 1930. Fatima prendra son véritable essor à
partir de 1940 lorsque, en vertu de concordat signé entre l’Eglise et le
régime, seuls les journaux dirigés par l’autorité religieuse auront droit
à la liberté d’expression.
Le Vatican s’y met et
progressivement s’engage à fond... En 1938, un second document officiel
refait si bien l’histoire, que les historiens, pour s’y retrouver, doivent
désormais parler de Fatima I et de Fatima II.
En 1942, le pape Pie
XII ordonne la publication d’une partie du fameux "secret" de Fatima, rédigé
sous le nom de Lucia plus de 20 ans après les apparitions. En pleine
euphorie nazie, alors que l’Allemagne triomphe partout, il fait de l’URSS la
seule responsable de la seconde Guerre mondiale. Le 13 octobre 1951, jour
anniversaire de la "danse du soleil", le Vatican annonce par l’intermédiaire
du cardinal Tedeschini que Pie XII a vu à quatre reprises, l’année
précédente, le soleil tourner dans la main de la Vierge !
Quelques semaines plus
tard, le 18 novembre, l’Osservatore Romano à son tour apporte sa
contribution en publiant deux photos du "prodige solaire de Fatima"
prétendument prises le 13 octobre 1917. Clichés d’un soleil qui ne tourne
par rond, certifiés "rigoureusement authentiques". Une campagne de presse
démontre le faux et usage de faux et oblige le Vatican à faire machine
arrière le 13 mars 1952. En 1960, le successeur de Pie XII, Jean XXIII,
prend connaissance du deuxième "secret" de Fatima, tardivement rédigé, et le
fait tomber dans les oubliettes du Vatican. La supercherie a sans doute paru
grossière à ce pape qui s’efforçait de rompre avec la politique de guerre
froide de son prédécesseur.
L’Eglise libère
pourtant les dernières hypothèques célestes lorsque Paul VI déplace en 1967,
cinquantenaire des apparitions, pour officialiser le miracle. Le souverain
pontife a beaucoup hésité et tenu à donner à sa visite un caractère privé.
Mais les photos montrant ensemble le chef de l’Eglise, Salazar et Lucia,
marquent pour les fatimistes la couronnement de leurs efforts.
Les fatimistes se font
fort de convoquer de nouveaux prodiges en renforts du premier. Voici le
"miracle des colombes". Les pigeons se posent spontanément sur la tête de la
Vierge de Fatima. On saura plus tard qu’elles ont été dressées
spécialement dans ce but. Puis vient le lot inévitable de guérisons
miraculeuses. Aucune ne sera reconnue comme telle par la médecine.
La plus fameuse et la
plus édifiante est celle de Vilar Chao en 1946. Une jeune fille, Amelia
Rodrigues Fontes, 17 ans, passant pour être malade incurable, affirme être
guérie après avoir eu la vision de la Vierge. Elle porte des stigmates en
forme de croix au front et à la main. Depuis le jour de l’apparition, elle
prétend se nourrir uniquement d’eau et de pétales de fleurs, comme celles
qu’elle a vu tomber du plafond de sa chambre. Les gens affluent vers la
"sainte de Vilar Chao". L’épiscopat portugais fulmine contre les septiques,
affirmant que cette preuve supplémentaire confirme le prodige de Fatima.
Hélas! Cinq ans plus tard, la tricheuse est démasquée dans un hôpital de
Coimbra où on l’oblige à subir divers examens. Elle se sent mal après 48
heures de jeûne forcé et l’on découvre qu’elle fabrique elle-même les
"stigmates" avec un crucifix. Sans l’action de Pr Joao Porto, au demeurant
président de l’Association des médecins catholiques, Amalia serait peut-être
devenue, un jour ou l’autre, une sainte de plus sur le calendrier. Si des
précautions semblables avaient été prises en 1917, Fatima serait resté un
gentil petit village terrestre inconnu des "cieux"...
"Quand un fidèle, y
compris Bernadette, voit la Vierge et que ceux qui l'entourent ne voient
rien, j’appelle cela, scientifiquement et médicalement une hallucination" (Père
Oraison, lors d’un colloque de l’Institut catholique).
Le cardinal Ottaviani, patron du Saint Office et gardien du dogme déclarait:
"Chrétiens, ne soyez pas si prompts à vous
émouvoir !"